Anecdote.

Une pote qui déménageait.  Comme d’habe, quand quelqu’un déménage, subitement il se rappelle de moi : « Eh David, tu fais quoi le week-end du 19 ?  Trop cool, tu peux venir m’aider à déménager ? ».  En temps normal, je suis heureux de rendre service.  Quand j’ai le choix.

Là, pour le coup, la pote m’annonçait qu’elle déménageait à telle date.  Et qu’elle comptait vraiment sur moi pour bouger son piano, et ses gros trucs.  Tous les potes venaient cette date là.  Le camion était réservé.  Tout était calé.  Et ça serait super sympa que je sois là, parce que sinon, ça la foutait « grave dans la merde ».  Donc en gros, j’avais le choix de changer tous mes plans et de me retrouver à déménager ma pote alors que j’avais franchement autre chose à foutre ce jour là, ou alors à passer pour le dernier des connards.  Genre je plantais tout le monde, et ils se démerdaient et se faisaient mal au dos en bougeant des trucs trop gros pour eux.

Bref, j’avais le choix entre subir une situation qui ne m’arrangeait pas et être quelqu’un de bien aux yeux des autres, ou alors me faire mal voir, et ne pas cautionner le fait qu’on me coince sans me demander mon avis.

Vous savez quoi ?  Comme un con, j’ai choisi de me coincer et d’accepter de subir, et d’être le mec gentil qui arrange tout le monde.  Et ça m’a mis en retard sur une deadline.  Et j’ai dû passer une nuit blanche pour rattraper le coup.  Et le pire c’est que j’ai rien dit, sur le moment.  Et j’y suis allé de mauvaise humeur, avec un peu de colère rentrée, et en traînant les pieds.  Ca m’a coûté 10 fois plus d’énergie que ça aurait dû.  J’étais juste en colère, en fait, et j’avais envie d’envoyer chier tout le monde.  Et d’ailleurs ça s’est carrément senti, et au final on ma fait remarquer que j’étais désagréable.  Et je l’étais.  Résultat des courses, j’ai dit « ok, ben en fait vous allez vous démerder avec votre putain de piano, et vous allez tous aller vous faire foutre ».

Et je suis parti.

Ce que je regrette dans l’histoire ?  Simple : je regrette de ne pas avoir accepté de passer pour un connard aux yeux de ma pote d’entrée de jeu, et de ne pas juste avoir dit « je suis pas dispo, tu aurais dû me consulter au lieu de tout planifier sans moi ».  La vérité, c’est que ce que ma pote a fait là, c’était carrément abusif.  Elle m’a placé dans une situation de contrainte (un peu aliénante) où, en gros, je ne pouvais pas simplement dire non sans que ça me coûte.  Elle l’a peut-être, probablement, fait sans le vouloir.  Mais c’était un coup de pute.  Et au final elle le savait bien, au moins après coup.

Churchill disait, et fort justement : « Vous avez des ennemis ? c’est bon signe. Cela signifie que vous avez défendu quelque chose, quelque part dans votre vie. »

Les carpettes n’ont pas d’ennemis.  Les mollusques non plus.  Et tout le monde adore les paillassons.

Je pense de plus en plus qu’il est préférable d’être honnête. D’être scrupuleusement soi-même.  D’être capable de déplaire.  Ca fait qu’on a généralement moins d’amis, mais qu’on a les bons.

Etre un connard, de nos jours, est de plus en plus une nécessité vitale.  Parce que le monde entier a des projets pour notre planning, pour notre temps, pour notre attention et pour notre vie toute entière, si on laisse faire.

Les connards et les connasses sont précieux.  Les gens vrais, capables de dire non, capable de dire « tu abuses, bordel », capables de dire « va te faire foutre » quand c’est nécessaire, ben ils sont précieux.

Mon pote Jean-Michel Snoeck, tatoueur à Bruxelles et responsable du magnifique gros dragon japonais que j’ai sur le bras gauche, a un panneau sur la porte de son studio de tatouage :

49% connard
51% bon gars

Fais pas chier.

Et lui, au moins, quand il dit oui, je sais qu’il le pense vraiment.

Des bisous 😉

David